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J’en ai lu des vertes et des pas mûres depuis le début du conflit qui oppose les étudiants  au gouvernement sur la question des frais de scolarité, et qui s’est littéralement transformé en grand mouvement social. Je sais qu’il y a eu des débordements argumentaires et émotifs (pour ne pas dire démagogiques) dans les deux camps. L’objectif de ce billet n’est pas d’en faire l’énumération, ou de faire la démonstration que les « verts » ont été plus ignobles que les « rouges » (ou vice-versa). Je tiens seulement à démonter un cheval de bataille de plusieurs détracteurs du mouvement de protestation actuel, à l’effet que celui-ci soit dirigé et essentiellement constitué d’adeptes du statu quo.

Les manifestants du statu quo?!

Ainsi, d’après André Pratte et Alain Dubuc (La Presse), Martin Coiteux, Joseph Facal (JdQ/JdM), Richard Martineau (TVA, JdM, JdQ), les manifestants et protestataires sont des tenants du statu quo. Ce sont des bébés gâtés qui veulent uniquement préserver les acquis actuels sans aucun ajustement ou changement. Que les manifestants croient (c’est du moins la prétention de ces chroniqueurs) qu’il soit possible de maintenir les frais de scolarité bas, sinon de les abolir, sans aller chercher de l’argent neuf pour nos universités ailleurs. Et qu’il en est de même pour pas mal tous les services publics. Et bien sûr, les manifestants veulent toutes ces choses aveuglément, étant manipulés et à la merci des grandes et méchantes centrales syndicales qui sont la cause réelle de tous les problèmes du Québec. Car après tout, les problèmes dans l’industrie de la construction sont manifestement la preuve que tout ce qui tourne pas rond au Québec est la faute du syndicalisme et l’État Providence, non? (sarcasme)

Je suis POUR le changement

Je ne parlerai pas au nom de tous les manifestants. Je crois que nul n’a le droit de le faire, puisque nous sommes pas un bloc homogène. Je parlerai en mon nom propre et j’inviterai d’autres à y joindre leur voix et à manifester leurs propres différences s’ils le désirent.

Je ne suis pas un partisan du statu quo. C’est bien mal me connaître que de croire que je suis allergique au changement. Je suis, comme tout être humain, naturellement résistant au changement, à l’inconfort qu’il apporte à mon quotidien. Mais je ne m’y oppose pas fondamentalement, pour autant qu’il soit pour le bien de la collectivité. Je suis donc un partisan du changement.

Mais contrairement aux chroniqueurs et éditorialistes susmentionnés, je crois qu’il est possible de réformer le système actuel vers la gauche, plutôt que vers le centre ou la droite. Ce qui ne veut pas dire de gaspiller davantage. Ni de donner plus de pouvoirs aux centrales syndicales qui font preuve du même esprit de corporatisme que certaines grandes entreprises. Aller vers la gauche ne veut pas dire non plus d’augmenter la dette à l’infini, ni de transformer le Québec en bastion communiste.

(Petite parenthèse en passant…. Pour ceux qui l’ignorent, le communisme n’a jamais réussi à s’implanter en Russie, qui s’est contenté de faire dérailler un régime socialiste à grands coups de totalitarisme et de corruption); et en Chine, actuellement, on a davantage affaire à une dictature capitaliste, qu’à un régime en bonne et due forme; et pour ce qui est de Cuba, il n’y a de communiste que le parti au pouvoir, mais on a plutôt affaire à un régime socialiste. Tout ça pour dire que le communisme est une vue de l’esprit inatteignable, et probablement non souhaitable. Alors n’ayez crainte: si c’est le communisme qui vous fait vraiment peur, c’est pas demain la veille que le Québec se tournera vers ce modèle de gouvernance…)

Je crois en un État fort, mais efficace, où tous les employés seraient fiers et adeptes de l’amélioration continue; pas pour travailler plus, mais pour en venir à améliorer constamment les services livrés à la population, et à en réduire progressivement les coûts, en éliminant le gaspillage. Je crois en une exploitation juste et équitable de nos ressources naturelles, qui considérerait l’environnement au même niveau que l’économie. Je crois en la modernisation du mouvement syndical, qui jadis fut  un modèle à l’international, et qui gagnerait à s’inspirer de ce qui se fait maintenant dans les pays scandinaves. Je crois en l’entrepreneuriat et l’innovation, et à la participation de tous les citoyens à la croissance d’une économie nouvelle, basée sur le savoir et le développement durable. Et je crois que TOUS les québécois devraient en bénéficier de manière juste et équitable, à la hauteur des efforts qu’ils voudront y mettre. Je vois mal en quoi ceci incarne le statu quo…

Chasser le statu quo et il revient au galop

Et si, au contraire, faire la promotion du statu quo était en fait de se taire et de laisser choses empirer? De laisser la corruption gangrener la société québécoise au point de devenir une nouvelle Grèce? De laisser nos dirigeants transférer le fardeau de la dette et de la fiscalité sur les épaules des jeunes travailleurs, plutôt que de répartir le tout convenablement entre les jeunes et les moins jeunes, les entreprises et les travailleurs? De conserver ce système parlementaire britannique qui alimente le cynisme citoyen, plutôt que d’opter pour un système proportionnel mixte, voire même à deux tours? De… (ah non, fait pas ça Math… c’est pas une bonne idée… et tant pis, je me lance…) … de demeurer au sein d’un pays qui nous ressemble de moins en moins, exempt de projet de société et dans lequel nous ne voulons pas que nos enfants grandissent?

Et si c’était ça le statu quo, en quoi les manifestants de ce printemps érable en serait-ils les plus farouches défenseurs? Je crois que l’on devrait relancer la balle à tous ces chroniqueurs mentionnés précédemment, leur dire de se regarder dans le miroir, puis d’aller se faire voir ailleurs! (j’aimais mieux la mouture originale de cette phrase, mais c’était vraiment beaucoup moins poli…)

Peut-être bien que je suis un rêveur. Peut-être aussi que je suis légèrement idéaliste, voire même utopiste. Ça me convient et je sais porter le chapeau lorsqu’il me va. Mais adepte du statu quo, ah ça, pas du tout!

I Wish I Had a Schilling
(For Each Senseless Killing)
For Every Senseless Killing
I’d Buy a Government
America’s for Sale
And You Can Get a Good Deal on It
(A Good Deal on It)
And Make a Healthy Profit
Or Maybe, Tear It Apart
Start With Assumption
That a Million People are Smart
Smarter Than One

– NoFX, The Decline (1999)

C’est triste de voir que même 13 ans plus tard, l’intégralité des paroles de cet opus de 18 minutes du groupe NoFX est totalement d’actualités. Et que ce déclin s’accélère également chez nous, au nord de la frontière.

Vous ne connaissez pas? Voici votre chance:

Ce qu’il y a de bien avec le fait de manifester une certaine ouverture d’esprit, c’est que nos idées peuvent évoluer.

Il y a une quinzaine d’années, j’étais un étudiant du cégep, le regard un peu trop posé sur mon nombril, curieux, mais peu instruit sur les affaires du monde, et qui n’avait pour seule source d’information qu’une certaine radio de Québec, où sévissait déjà à l’époque un dénommé Fillion au micro de son monde parallèle. Dans mes discussions, je versais donc dans le même argumentaire mal appuyé que je reproche aujourd’hui à certains auditeurs de CHOI, ne faisant que répéter tout haut ce que j’entendais à la radio tout fort, sans trop y réfléchir. Et je m’insurgeais ensuite contre ceux qui n’étaient pas d’accord avec moi, prétextant qu’ils ne comprenaient rien à rien, etc.

Déjà après quelques années d’université, avec un accès plus grand à de l’information provenant de sources variées (entre autres grâce à internet), et une certaine maturité de ma part, mon discours était déjà plus nuancé, plus ouvert à une vraie discussion: celle qui se base sur des arguments solides et défendables, mais qui concède aussi les erreurs factuelles et balaye de la main les propos démagogues et empreints de préjugés. Le genre de discussions que l’on retrouve moins aujourd’hui, avec des opinions toujours plus polarisées et de plus en plus démagogues

Enfin… lors d’une de ces discussions avec des collègues de travail, il fut alors question des assistés sociaux, de ces « maudits BS qui vivent au crochet de la société ». J’avais lancé l’idée qu’un assisté social ne devrait peut-être pas dépenser son chèque à fumer, à prendre de la bière ou à acheter un billet de loterie. La réponse d’un collègue: « Ah oui? Ainsi, le BS doit être parfait? Le riche, lui, peut se permettre tous les vices, toutes les luxures, tandis que le BS, lui, devrait vivre la vie parfaite d’un saint reclus? Devra-t-il suivre ce régime vertueux jusqu’à sa mort, même si malgré tous ses efforts il n’arrive pas à ce sortir de sa condition? » Cette idée m’avait fait grandement réfléchir.

La vertu n’est pas l’exclusivité des pauvres

Bien sûr, certains assistés sociaux abusent de ces petits luxes, vivent des problèmes de dépendances à certaines substances, et omettent même de prendre soin de leurs proches en dilapidant ce précieux chèque que nous tous citoyens payeurs de taxes et d’impôts leur donnons chaque mois. Mais pour les autres, pour qui l’aide sociale est un point de non-retour; pour ceux qui travaillent au salaire minimum comme des dingues: n’ont-ils pas eux aussi droit à leur p’tite frette du vendredi, qui apporte un baume sur leurs plaies vives?

La vertu démagogique

Vous vous demandez probablement pourquoi, après plusieurs mois d’inactivité, mon premier billet de blogue en est un sur la pauvreté. D’abord, parenthèse: on ne parlera JAMAIS assez d’inégalités sociales, qu’elle soit intergénérationnelles ou reliées aux classes sociales. Mais non, ce n’est pas pour cette raison que je reprends aujourd’hui ma plume (ou devrais-je dire, mon clavier).

Depuis que le gouvernement Charest a annoncé la hausse des frais de scolarité à l’université, j’entends ce même argument fallacieux sur plusieurs tribunes; cet argument qui semble issu de la même pensée monolithique que j’avais lorsque j’étais endoctriné dans la secte radiophonique de Québec, et qui s’appliquait alors aux assistés sociaux: les étudiants n’ont qu’à prendre deux bières de moins par fin de semaine; ou à ne pas s’acheter d’iPhone; ou à ne pas voyager dans le Sud, etc. Ainsi, à l’instar des assistés sociaux, l’étudiant devrait être un modèle de vertu?

Le citoyen (et le parent) en guise de modèle

Qu’en est-il des citoyens enragés, qui traitent les étudiants de tous les noms en leur enjoignant de reprendre leurs cours en cessant de se prendre pour des enfants gâtés? Et qui pendant ce temps, emplissent leurs marges et cartes de crédits pour aller dans le Sud deux fois par année; pour s’acheter plusieurs télés de 55 pouces à plasma, un iPhone, un iPad, un système cinéma maison; qui dépensent une partie de leur paye en bière, vin, et sorties ?

Contrairement à ceux-ci, qui incluent probablement leurs propres parents, les étudiants devraient faire preuve d’une vertu sans faille? « Faites ce que je dis et non ce que je fais. Et fermez vos gueules! »

Je ne dis pas qu’il est normal pour un étudiant de se payer tout se luxe. Moi-même, en tant qu’étudiant, je faisais preuve de retenue. Mais ça ne m’empêchait pas d’avoir du plaisir. Je me doutais bien qu’une fois mes études terminées, dans le tourbillon du 8 à 4, des enfants, et des comptes à payer, j’aurais probablement beaucoup moins de temps pour mon petit nombril.

Combattre l’endettement, je veux bien, mais tout le monde alors a un examen de conscience à faire. TOUT le monde, pas seulement les étudiants. Mais ceci est un autre sujet.

La hausse: la solution?

Est-ce que la hausse des frais de scolarité est une solution? Est-ce que les étudiants vont vraiment changer leurs habitudes, devenir sages (et ennuyeux) comme des images, et consacrer la majeure part de leur budget à leurs études? Je ne prétends pas détenir la vérité absolue, mais mon petit doigt me dit qu’ils s’endetteront simplement davantage, comme leurs parents, comme leurs concitoyens.

Mais je ne réponds pas à la question: est-ce que la hausse des frais de scolarité est une solution? Euh…une solution à quoi? Au sous-financement des universités? Le problème est-il une question de financement ou plutôt de gestion des sommes actuellement investies dans le système ? Comment peut-on proposer une solution à un problème, si on n’est pas tout à fait sûr de la nature même du problème ? La suite dans un prochain billet…

Que s’est empressé de dire l’ex-président Georges Bush au lendemain du 11 septembre 2001 ? N’arrêtez surtout pas d’aller magasiner!

Cette navrante recommandation est répétée ad nauseam depuis 10 ans, comme un mantra, pour inciter les américains à dépenser et ainsi, à faire fonctionner l’économie américaine le plus possible. Le hic, c’est que les Américains n’ont pas tous un porte-feuille aussi garni que Warren Buffett. C’est donc via le crédit que les Américains ont maintenu leur économie à flot, et ça n’a pas duré; car ils sont maintenant pris à la gorge, tout comme leur propre gouvernement, qui a englouti des sommes gargantuesques dans deux guerres coûteuses, en Afghanistan et en Irak.

Résultat : les États-Unis sont dans une situation financière précaire, et rien ne semble montrer qu’ils vont s’en sortir rapidement. Sans compter que de telles mesures n’ont d’impact que sur la production intérieure (ou celles des pays étrangers qui exportent aux USA), et qu’elles ne résultent pas en de l’argent neuf.

De ce côté de la frontière, le même danger nous guette. Bien que nos institutions financières soient mieux gérées et protégées qu’au sud, le niveau d’endettement des ménages canadiens semble avoir dépassé celui des ménages américains. Ce qui est le plus inquiétant, c’est le changement de ton de la Banque du Canada, comme le rapportait cette semaine sur son blogue Gérald Fillion :

Alors que l’économie a brutalement changé de direction cet été, la Banque du Canada indiquait dans son communiqué du 7 septembre dernier que «la nécessité de réduire la détente monétaire a diminué ». Autrement dit, il n’est peut-être plus nécessaire d’augmenter les taux d’intérêt.
Bien que la réaction de la Banque du Canada, dans le contexte économique actuel, soit normale, le problème demeure le même : les Canadiens sont endettés et ça ne s’améliore pas.
On apprenait mardi que le ratio d’endettement par rapport au revenu disponible s’élevait maintenant à 148,7 % au pays. Pour chaque tranche de 100 $ de revenu disponible, les Canadiens ont, en moyenne, une dette de 148,70 $, y compris le crédit à la consommation et la dette hypothécaire. C’est un record.
Indirectement, avec un taux directeur inchangé à 1 %, l’action de la banque centrale a pour effet de ne pas entraver la consommation à crédit au pays et ainsi, d’éviter de ralentir davantage l’économie. La banque se fait moins pressante dans son message de prudence.
Mais ne serait-il pas contradictoire de demander aux Canadiens de soutenir la reprise par leur consommation, alors qu’on ne cesse de les avertir depuis deux ans des dangers de leur niveau d’endettement?

Le piège est tendu, et il ne faut évidemment pas tomber dedans : les Canadiens doivent effectivement « régler leurs affaires » et ne profiter des bas taux que pour l’essentiel et du durable; ce n’est pas le temps de s’endetter pour partir en voyage dans le sud, ou pour s’acheter un nouveau cinéma maison, mais pour faire des rénovations, et encore… ne faire que le strict minimum, surtout si la marge de crédit commence à être bien garnie. Tout en pensant à rembourser les plus gros emprunts rapidement, avant que les taux ne remontent.

Je suis par contre d’accord avec la plupart des analystes qui pensent que les taux ne remonteront pas de si tôt (du moins, pas avant un an et demi), et que lorsque cela se produira, qu’ils ne remonteront pas plus de 2 ou 3%. Autrement, il y aura pas mal de monde à la rue. Mais, la Banque du Canada n’aura éventuellement pas le choix, et devra monter les taux de manière substantielle. Lorsque cela se produira, nous aurons probablement intérêt à avoir un peu d’épargne de côté, ou à tout le moins, un peu de marge de manoeuvre dans nos budgets pour amortir ces hausses.

En terminant, je vous propose une excellente (et courte) analyse sur l’état des finances publiques à travers le monde, que présente François Barrière, sur son blogue Barrière Sans Frontière. Je porte votre attention sur le dernier paragraphe de son premier constat :

En 1995 le Canada dépassait les 100% d’endettement brut, puis décida de faire un nettoyage pour finalement se retrouver à 68% au début de la crise actuelle. Nos gouvernements n’avaient plus le choix de réagir, mais surtout et heureusement, ils en avaient la capacité. En à peine dix ans, nous sommes passés de cancre à premier de classe. Aujourd’hui nous sommes revenus au milieu du rang.

Au milieu du rang? Avec les conservateurs qui se vantent (à tort), d’êtres les champions de l’économie?

Vraiment pas surpris…

Pour ceux qui l’ignorent, je suis rédacteur technique de profession. Ingénieur de formation, mais dont la carrière a bifurqué il y a de cela près de 4 ans, vers la rédaction technique.

Qu’est-ce que ça mange en hiver, un rédacteur technique, m’écrirez-vous? Eh bien, tout dépend du domaine. Mais en gros, l’essentiel du travail de rédacteur technique en est un de vulgarisation. Les fameux manuels que personne ne lit jamais sont rédigés par des rédacteurs techniques. Même les instructions d’assemblage d’Ikea sont probablement conçus par des rédacteurs techniques, même si plusieurs graphistes y apportent sûrement leur contribution.

En fait, les utilisateurs ne lisent les manuels que lorsqu’ils ont de sérieux problèmes que leur système D ne peux résoudre. Ils bénissent alors le ciel pour la qualité de l’information trouvée, ou maudissent le fabricant en contactant le service d’assistance technique.

Pourquoi je vous parle de rédaction technique? Parce qu’il s’avère que mon domaine d’expertise est celui de l’énergie, tout particulièrement des systèmes de modernisation des postes électriques et des réseaux de distribution d’énergie. Je crois donc être parfaitement qualifié pour vous parler de ces fameux compteurs en or d’Hydro-Québec.

Si vous écoutez un peu la télévision, vous avez sûrement vu la publicité en question. Autrement, vous pouvez avoir vu l’équivalent dans un journal, ou sur un site web. Si vous ne savez toujours pas de quoi il est question, je vous invite à visiter le site web qui présente de long en large ce qui s’avère être une campagne syndicale peu subtile visant d’abord et avant tout la préservation d’un rapport de force.

Qui se cache derrière la campagne?

D’abord, le site web demeure vague à ce sujet, mais pas complètement. En fouillant un peu, on voit rapidement qu’il a été conçu par (ou pour) le Syndicat des employé-e-s de techniques professionnelles et de bureau d’Hydro-Québec, la section locale 2000 du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP-2000). Le site a donc un biais évident, ce qui ne veut pas dire pour autant qu’il ne contient que de la propagande syndicale. Il présente également des éléments factuels, mais ceux-ci survivent-ils à l’épreuve des faits?

Le remplacement des compteurs actuels

Je n’entrerai pas les détails économiques, n’étant pas économique de formation. J’assumerai donc que les chiffres fournis par le SCFP-2000 sont valides. Par contre, ce que le site omet de préciser, c’est l’autre côté de la médaille. Les dirigeants d’Hydro-Québec ne sont quand même pas des abrutis. Et bien que le cynisme ambiant nous a habitué au copinage, je doute que la haute direction de notre chère société d’état soit entièrement acoquinée avec ceux de Landys+Gyr, le fabricant de compteurs intelligents qui a été sélectionné pour approvisionner le Québec en cet élément de controverse.

Alors pourquoi donc remplacer les compteurs mécaniques actuels par des compteurs dits intelligents, qui peuvent être lus à distance et automatiquement ? La lecture en temps-réel de la consommation électrique des ménages québécois va s’avérer fort utile pour gérer la crise énergitique qui pointe à l’horizon.

Vers la crise énergitique

Non seulement la consommation électrique mondiale est en forte croissante, avec le nombre grandissant d’appareils énergivores dans nos foyers, mais l’arrivée prochaine de la voiture électrique va faire bondir cette consommation de manière phénoménale. Imaginez : toutes ces voitures arrivant à la maison sur l’heure du souper, rapidement mises en mode chargement. Vous vous demandez qu’est-ce que ça a à voir avec les compteurs intelligents? J’y viens…

Le plus gros sujet de recherche dans le domaine électrique est au niveau de la conservation de l’énergie électrique, à l’aide de batteries de haute capacité. C’est d’ailleurs le point faible des énergies vertes: on ne décide pas de la force du vent et de l’intensité du soleil; étant difficilement stockable, il faut utiliser l’énergie éolienne et solaire dès qu’elle est produite. L’hydro-électricité est plus facilement gérable à ce niveau: on peut augmenter ou réduire le débit d’eau dans les barrages, selon la demande.

Ainsi, il se gaspille une quantité impressionnante d’énergie: car le réseau est conçu pour répondre à la demande des périodes maximales de consommation. Comme l’heure du souper l’hiver, où se font aller les chauffe-eau, les fours, le chauffage, l’éclairage, etc. Hydro-Québec recommande toujours à ses utilisateurs de faire fonctionner leurs lave-vaisselles, laveuses et sécheuses en dehors des périodes maximales de consommation.

C’est bien beau la sensibilisation, mais ça ne fonctionne jamais assez. Il faut viser le consommateur là où ça fait mal: pas dans les couilles, mais dans sa poche. Il faut donc pouvoir facturer l’énergie à un taux plus élevé durant les périodes de pointe, et à un taux plus faible aux périodes de faible consommation, en espérant que ça le fera davantage changer ses habitudes et que l’on gaspillera moins d’énergie. Vous voyez où je veux en venir? Les compteurs intelligents permettent la facturation variable, car ils permettent la lecture en tout temps de la consommation, ce qui n’est bien sûr pas possible lorsqu’un employé doit en faire la lecture manuelle.

Plusieurs services publics d’énergie américain utilisent déjà les compteurs intelligents à cette fin. Hydro One en Ontario a déjà un projet pilote en marche. Hydro-Québec, qui est habituellement un leader en la matière, traîne un peu de la patte à ce niveau. Et c’est sans compter les programmes de réponse à la demande, qui permet aux compagnies d’énergie du même genre qu’Hydro-Québec d’offrir des tarifs réduits à ces clients pour pouvoir arrêter temporairement à distance leur air climatisé en milieu de journée, lorsque ceux-ci ne sont pas à la maison, afin de réduire le gaspillage.

Tous ses efforts permettront, à terme, d’exporter toute l’énergie économisée aux américains. Donc, en plus des économies réalisées par les québécois, ceux-ci récolteront plus de bénéfices par l’entremise des ventes extérieures de leur société d’état chérie. Je doute que ces chiffres soient inclus dans les estimés du SCFP-2000.

Le vrai problème, s’ils en est un

L’arrivée des compteurs intelligents est donc inévitable, et l’ensemble des bénéfices apportés ont volontairement été omis dans la campagne publicitaire des compteurs en or, ce qui constitue à mon avis une tactique malhonnête. Un peu plus de transparence aurait été souhaitable, même si on s’entend que le sujet est quand même très complexe, surtout pour le commun des mortels. Du moins, ce n’est pas avec ce genre de campagne que les syndicats vont redorer leur blason, fortement mis à mal par les groupes de droite et les abus d’une poignée de ces membres qui sont rapportés à grands coups d’éclat dans certains médias.

Le vrai problème, s’il en est un, est celui de la confidentialité du consommateur. Le compteur intelligent peut être vu comme un autre pas qu’effectue Big Brother pour pénétrer dans votre demeure, afin de tout savoir sur votre consommation d’énergie, sur l’utilisation de vos appareils, bref… des activités que vous faites chez vous, en privé. Mais encore faut-il qu’Hydro-Québec obtienne les autorisations pour se rendre jusqu’à ce niveau de détail dans sa cueillette de données… et que le reste des appareils que vous possédez à la maison soit capable de les lui fournir. Il faut donc maintenir la vigilance, mais on s’entend qu’on est encore loin du compte.

Pour ce qui est des pertes d’emplois, j’éprouve de la sympathie pour les membres du SCFP-2000, mais je crois qu’ils devraient plutôt prendre exemple sur leurs homologues scandinaves, qui essaieraient plutôt de s’entendre avec l’employeur pour donner à ces employés une seconde carrière, plutôt que de préserver un métier un peu archaïque en cette deuxième décennie du 21ème siècle, celui de releveur de compteur.

Non seulement le changement de position de M. Sam Hamad vers le Ministère du Développement économique, Innovation et Exportation n’est pas un désaveu, mais l’ex-ministre aux Transports a fait un travail impeccable.

Cet avis n’est pas le mien, mais bien celui de notre Premier Ministre lui-même!

Oui, oui… vous avez bien lu: ce même ministre qui a affirmé que « toutes les routes du Québec qui étaient ouvertes étaient sécuritaires » a fait un travail impeccable.

Ichhh… pas hâte de voir ce qu’il va faire au développement économique, mais surtout à l’innovation. Ça en dit long sur les priorités de Jean Charest : vendons nos ressources naturelles à bas pris aux étrangers, mais surtout, n’essayons de devenir plus intelligents, innovateurs, et de nous tourner vers l’économie du savoir comme dans les riches pays scandinaves.

Misère…

Avec tout ce que j’entends depuis une semaine, personnellement, si c’est pour se faire dans de telles conditions, je n’en veux plus d’amphithéâtre. Qu’il soit multifonctionnel ou uniquement dédié au hockey. Et au diable les Nordiques, je deviendrai un fan des Remparts!

Non mais je rêve ou quoi? Dans certains pays, les gens sortent dans les rues, au péril de leurs vies, pour réclamer plus de justice, d’équité, de respect, de démocratie; remarquez que l’on pourrait débattre des réels intérêts derrière le printemps arabe, mais gardons ceci pour une autre chronique.

Ici, on est prêt à mettre tout ça de côté pour un colisée et une équipe de hockey. Au diable l’état de droit, au diable la démocratie parlementaire. Vive le populisme, le hockey et la pseudo-liberté! Du pain et des jeux!

Appelons un chat un chat, et un chien un chien: le projet de loi du maire Labeaume vient donner un cadre légal à ce qui ne l’est peut-être pas complètement. C’est une boîte de Pandore incroyable qui s’ouvre ici pour toutes les administrations municipales. Vous avez un projet rentable, mais qui fera chier des tas de gens… n’ayez crainte: faites-vous adopter une loi-Labeaume à l’Assemblée nationale et tout sera réglé. Que les préoccupations des citoyens soient légitimes ou pas, peu importe.

Et de grâce, lâchez-moi avec l’argument de l’agenda caché de De Belleval: que Bell, le syndicat des employés d’Expo-cité ou la reine d’Angleterre tirent les ficelles derrière, je m’en contre-fiche. Ce qui m’intéresse, ce sont les faits et les raisons invoquées. Et d’après ce que j’ai encore lu cette semaine, ces faits et raisons sont tout à fait valables.

Si le projet n’est pas rentable, et qu’il devient source de fierté pour la ville, je n’ai pas de problème avec ça. Mais je veux le savoir maintenant. Si mes taxes et mes impôts vont servir à enrichir quelqu’un qui méprise les travailleurs et l’accès à de l’information de qualité, je veux être certain que PKP ne démontre pas le même mépris envers celui qui le permettra d’engranger des profits, que ce soit directement avec le club de Hockey ou via ses plate-formes médias. Ce sera ensuite à nous de montrer ou pas notre accord lors des prochaines élections municipales, même s’il sera alors trop tard pour reculer: car c’est étrangement à nous d’assumer le risque. Encore un autre bel exemple de socialisation des coûts, et de capitalisation des profits.

En attendant, M. Labeaume peut-il au moins avoir la décence de montrer patte blanche, plutôt que d’exiger un chèque en blanc de notre part?

J’allais écrire un long billet sur le projet de loi du maire Labeaume, mais je vais y réfléchir encore davantage, maintenant qu’il a été déposé à l’Assemblée nationale (pris sur le blogue de Gilbert Lavoie du Soleil):

Projet de loi no 204 (Privé)

LOI CONCERNANT LE PROJET D’AMPHITHÉÂTRE MULTIFONCTIONNEL DE LA VILLE DE QUÉBEC

ATTENDU que la Ville de Québec a le projet de construire un amphithéâtre multifonctionnel dans le Parc de l’Exposition Provinciale;
Que l’amphithéâtre multifonctionnel est un édifice public financé par la Ville de Québec et le gouvernement du Québec;
Qu’il y a lieu de permettre la participation du secteur privé à ce projet d’amphithéâtre multifonctionnel;
Que Quebecor Media Inc. a déposé aux autorités de la Ville de Québec, le 26 février 2011, une proposition qui a été acceptée par la résolution CV-2011-0174 de son conseil de ville le 7 mars 2011;
Que ce projet revêt un caractère exceptionnel et qu’il est nécessaire d’assurer la sécurité juridique de la proposition déposée et des contrats à conclure à la
suite du dépôt de cette proposition;
Que l’intervention du législateur permettra le démarrage immédiat du projet;
LE PARLEMENT DU QUÉBEC DÉCRÈTE CE QUI SUIT :
1. Malgré toute disposition inconciliable, la Ville de Québec peut conclure tout contrat découlant de la proposition faite par Quebecor Media Inc., le 26 février 2011, et acceptée par la résolution CV-2011-0174 adoptée par le conseil de la ville le 7 mars 2011. Un tel contrat doit être substantiellement
conforme au contenu de la proposition. La mise en concurrence effectuée en vue d’obtenir la proposition visée au premier alinéa et l’octroi de tout contrat conclu en vertu de cet alinéa sont réputés ne pas contrevenir aux articles 573 à 573.4 de la Loi sur les cités et villes (L.R.Q., chapitre C-19) et à la politique adoptée en vertu de l’article 573.3.1.2 de cette loi.
2. La présente loi entre en vigueur le (indiquer ici la date de la sanction de la présente loi).

En attendant, vos opinions et commentaires sont les bienvenus… 🙂

Je suis un peu en panne d’inspiration ces temps-ci, alors parlons d’un sujet qui me tient à coeur, même si la dernière fois qu’il a fait la manchette remonte à près de 2 mois: les frais de scolarité!

C’est un sujet qui soulève assurément les passions. Et pour cause: si certains débats se font sur un seul axe (social ou économique), l’éducation ne peut être abordé autrement que sur les deux.

Je ne cacherai pas que je prône la gratuité scolaire. Tant de subventions sont données à gauche et à droite, autant pour les plus riches que les plus pauvres. Ce qu’il y a d’intéressant avec la question des frais de scolarité, c’est qu’elle préoccupe d’abord et avant tout la classe moyenne. Et je crois qu’il s’agit du plus bel investissement qu’un état puisse faire dans sa population.

Les gens instruits sont habituellement (et je vais ici peser mes mots) plus préoccupés par leur santé. Ils sont habituellement plus informés. Plus impliqués dans leur milieu et la société en général. Leur apport économique est indéniable, qu’il s’agisse des professionnels de l’économie du savoir ou des travailleurs manuels qui sont essentiels dans toutes les sphères du travail.

Bien sûr, au Québec, nous sommes gâtés: les frais de scolarité étaient gelés depuis belle lurette. Mais est-ce que cela devrait être la seule raison d’une hausse? Les frais sont plus hauts ailleurs, alors il faut aussi les monter… bel exemple de nivelage vers le bas (même si « bas » et « hausse » ne vont pas de prime abord dans la bonne direction).

On invoque aussi souvent l’argument que tout le monde doit faire sa part. Faites-moi rire! Les plus riches qui ne paient pas d’impôt la font-elle, leur part? Et les plus pauvres? Qui écopera, encore, d’une hausse de frais de scolarité? Encore la classe moyenne, assurément. Et en réduisant l’accès à l’éducation supérieure, on prend le risque d’obtenir moins de gens compétents pour nos entreprises et institutions, ce qui ne peut que nous appauvrir davantage; sans compter l’effet collatéral d’une augmentation de l’écart entre les plus riches et les plus pauvres, en réduisant la richesse moyenne de cette même classe moyenne.

Tout le monde à gauche n’est pas de mon avis. Lisée, de son côté, ne croit pas que la gratuité soit viable dans le contexte économique actuel, et propose plusieurs solutions dans son essai « Pour une gauche efficace ». Celle qui m’a semblé la plus intéressante est celle d’un contrat de citoyenneté, et vient principalement s’attaquer au supposé exode des cerveaux. Je me permet ici une petite parenthèse: si des gens instruits quittent la province pour revenir plus tard, avec un meilleur bagage et des idées nouvelles, c’est d’après moi très bénéfique pour tout le monde, pour autant que cet exode ne soit pas permanent.

Je reviens donc à la proposition de Lisée: deux niveaux de tarification, soit la tarification actuelle (avec quelques ajustements, j’y viens), et une tarification majorée, indexée pour se comparer à celles des autres provinces canadiennes. La tarification actuelle serait indexée pour tenir compte des perspectives d’emploi. Car on s’entend qu’un baccalauréat en philosophie ne donnera pas le même taux de placement et les mêmes conditions salariales qu’un ingénieur, un notaire ou un médecin. Si Lisée parle d’un contrat de citoyenneté, c’est qu’il propose qu’un étudiant puisse profiter des tarifs actuels s’il s’engage à passer au Québec 10 des 15 années suivant ses études; il peut donc partir pour 5 ans, dès la fin de son cours, et revenir pour les 10 suivantes; ou encore faire 10 ans de loyaux services au Québec, pour ensuite aller voir si l’herbe est plus verte chez nos voisins canadiens ou américains. Si nos amis libertariens ne veulent pas signer un tel contrat, libre à eux: mais ils doivent payer des frais de scolarité semblables à ce qui se paie ailleurs.

Je pourrais écrire sur le sujet encore davantage, mais je préfère vous lire là-dessus, question de ne pas faire de débat à sens unique. 🙂

Je vous laisse en terminant sur deux lettres ouvertes publiées au début avril sur Cyberpresse: la première applaudissait la hausse des frais de scolarité, et la seconde répliquait fort bien à la première. Je vous laisse sur la finale de la dernière lettre, signée par des étudiants universitaires de premier cycle:

Mais là où, à notre sens, M. McSween dépasse les bornes, c’est dans sa tendance à appliquer la logique du marché au monde de l’éducation. L’éducation n’est pas un panier de bleuets du marché Jean-Talon ou un four à micro-ondes de chez Brault & Martineau: sa valeur ne peut être chiffrée pour la simple et bonne raison qu’elle dépasse (et de beaucoup) ce qu’un marché boursier peut évaluer.

L’éducation est bien plus qu’un «investissement» ou un simple service. Ce n’est pas un REER ou une police d’assurance. L’éducation est ce qui fait la différence entre une société éveillée et une société aliénée, entre un citoyen et un simple engrenage du système. L’éducation est ce qui fait que des générations entières ont pu, à travers l’Histoire, s’émerveiller du savoir cumulé par l’humanité au fil des âges, et d’avoir la capacité et le courage d’y contribuer à leur tour.

L’éducation, de l’enfance à l’âge adulte, n’est pas un privilège. C’est un droit et un devoir pour chacun d’entre nous. Vouloir la monnayer, en faire un vulgaire produit pour les centres d’achats de la nation, est une insulte contre l’espèce humaine et l’idée même de progrès.

Ce que j’aime moins de Labeaume, c’est son abnégation de la démocratie. Sa conception à lui, c’est qu’en votant pour lui, on lui fait un chèque en blanc pour 4 ans.

C’est donc sans surprise qu’arrive ce projet de loi privé visant à faire taire ceux qui posent des questions au sujet de l’entente conclue avec Quebecor pour le nouvel amphithéâtre à Québec.

Personnellement, je suis pas mal en faveur de la construction de cet édifice, tout comme de son financement partiellement public. Par contre, je suis de ceux qui doutent fortement que l’on a vraiment obtenu le meilleur « deal » possible. Alors je crois qu’il est tout à fait légitime que des citoyens posent des questions et exigent des réponses. Après tout, c’est notre fric, pas seulement celui de Labeaume et de PKP qui va servir à financer tout ça.

Pour plus de détails sur les chiffres, voir le site de MM. De Belleval et Miville-Dechêne.